La romance des couteaux
P A R O L E S
LA ROMANCE DES COUTEAUX
Cavale
Transforme-moi en hirondelle
Car mon corps se meurt d’avoir des ailes
Transforme moi en mouche à feu
Pour que dans le noir tu puisses me voir un peu
Transforme moi en feuille blanche
Je serai le lit à tous les mots qui dans ta tête bougent trop
Transforme moi en répondeur
Sur ma bande ta voix en écho dans la demeure
Et si mon corps ne répond plus
Enlace-moi
Et si je fuis
Détache-moi
Et pars en cavale avec moi
Transforme moi en flaque d’eau
Je mouillerai tes pas et partirai en douce avec toi
Transforme moi en chemin de fer
Ça m’empêcherait de prendre le champ
Même si j’aime prendre ton champ souvent
Transforme moi en livre d’histoire
Tes yeux sur mes pages à chaque soir
Et si j’étais la chandelle à ton chevet
La mèche en feu pour t’allumer un peu
Transforme moi en mélodie douce et forte à la fois
Pourvu qu’elle t’emporte avec moi
En cavale entre tes doigts.
Poêle à bois
J’ai le feu pris à l’intérieur de moi
J’ai le cœur qui vit au tremblement
Dans tes yeux je me dépose entièrement
Tes mots tendres me fondent dans la bouche
Les fils de mes nombreuses idées se touchent
Je n’ai plus qu’à abandonner mon corps à ton camp
Reste-là, reste-là
Pour que rien jamais ne change quoi que ce soit
Pour que ton feu soit pris pour longtemps à l’intérieur de moi
J’ai le feu qui me brûle par en dedans
Sur ton cœur je dépose ma voix
Sur ta peau mes lèvres chavirent doucement
Je savoure le spasme du moment
J’emprisonne dans mon ventre chacun des grands vents
Pour les sentir sur moi un peu plus longtemps
Reste là, reste là
Pour que rien jamais ne change quoi que ce soit
Bouge pas, bouge pas
Pour qu’à tout jamais je m’enflamme de toi
Pour que mon feu soit pris pour longtemps à l’intérieur de toi
La chasse
J’suis p’tite comme une aiguille dans une botte de foin à tes yeux
J’te pique même pas un peu
T'es dans mon champ de tir, mais j’tire à blanc et ça me tue
Tu t’joues de moi… j’me meurs de toi
Et si l’amour c’était toujours une balle perdue
Qui dévie dans un vent qui passe entre toi et moi
Et si mon cœur se séchait vite de toi
Que cette fièvre qui m’rentre dedans ne voulait y rester qu’un temps
Notre histoire de cœur c’t’un battement d’ailes qui me fend la peau
Une chance qu’on a le vent dans l’dos
Envole-toi avec moi même si y fait pas tout l’temps beau
On va se tenir au chaud
On se touche et ça nous abîme un peu
Tu te caches et j’en perds mes plumes à petit feu
Donne-moi tes yeux, j’ai besoin de m’y perdre un peu
Donne-moi tes yeux
À travers les branches ton œil dans la mire du mien
T’es beau et moi j’aime bien
La chasse est finie, j’t’emporte toi pis ton petit cœur aussi
Dans mon petit nid joli
Et si l’amour c’était toujours une balle perdue
Qui dévie dans un vent qui passe entre toi et moi
Et si mon cœur se rougissait de toi jusqu’à sa mort
Et que cette fièvre qui me prend m’habitait tout ce temps
Mais mon coeur
Laisse-moi fermer les yeux
Pour ne voir que ce que je veux
Puisque devant moi tout me sèche et tu le vois
Je n’ai pas ta clé des champs
Et j’ai avalée la mienne
Pour laisser à mon cœur un peu plus de front
Rien ne sert de tenter de voir sur mes yeux
Baisse plutôt les tiens pour voir vers ces eaux qui coulent sous tes ponts
Qui collent sous tes pas
Tout me sèche mais mon cœur joue dans tes yeux
Moins qu’avant les fleurs du tapis s’en prendront à mes pieds
Et si je tombe ferme tes yeux
Et prends mon cœur si tu veux
Panache
Je t’ai perdu, je t’ai perdu
Ton camouflage est trop fort
Ainsi je reprendrai le nord
Avant que la nuit vole ton ombre et mon chemin aussi
Mais lors de mon retour mon amour
Mes hauts talons j’ai cassé
Ainsi je ne pourrai déposer
Mes yeux dans tes yeux si hautement perchés
Dès lors jamais plus je marcherai seulement que pour te respirer
Alors reviens-moi, mon lit géant souffre sans toi
Ta fourrure à mon cou
Ton souffle sur ma joue
T’es reparti et à tes bois je suis restée accrochée
Et j’ai de nouveau déchiré
Ma seule robe si pénible à rapiécer
Mais comme à chacun de tes départs j’ai laissé allumée
La lanterne pour éclairer
Le chemin qui te ramènera à ma véranda et mes baisers
Dès lors jamais plus je ne t’attendrai seulement que pour t’effleurer
Alors reviens-moi, mes murs sont si vides sans toi
Ton panache à mon cou
Ton souffle sur ma joue
Un beau matin sur le tapis trempé, je t’ai retrouvé
Les bois et le cœur gelés
Moi qui étais enfin sur le point de t’oublier
Mais depuis ton charmant retour mon amour mes ongles j’ai cassé
À tenter de te raccrocher
Solidement et joliment au-dessus du foyer
Pour qu’à jamais je puisse te garder
Telle une proie que j’aurais capturée
Mais comme à chaque fois ton cœur a besoin de prendre le bois
Tant pis pour toi cette fois
Je ferme à clé la porte de ma véranda
Toi sur moi
Un coup, un feu, un tir à l’arbalète
Directement au plus profond de mon être
Je flanche, mes jambes et mon cœur me suivent
Incompréhensible, tellement impossible
La corde de mon cerf-volant s’est cassée
Et s’est follement emmêlé
Aux branches de ton coeur
Doux comme un vol d’oiseaux qui effleure
Le lac où se baigne mes ardeurs
Comment prévoir le feu d’artifice
Qui saute en moi lorsque nos êtres se magnétisent
Comment est-ce possible de perdre mon nord
Nos pôles en symbiose nous arrachent le corps
Y’a ce vide en moi qui se fracasse à ma fenêtre
Avec des portraits de toi qui s’arriment à tout mon être
J’ai vendu au diable l’âme de ma raison
Sauté en bas de ma montagne et volé en éclat
La tempête se terre et j’ouvre mes volets
Je ne peux pas crier, mais j’ai le droit de m’envoler
Comme un cerf-volant à la corde cassée
Et follement m’emmêler
Aux branches de ton cœur
Fou comme un vol d’oiseaux qui effleure
Le lac où se baignent mes ardeurs
La barque
Mon cœur est une barque qui prend l'eau quelques fois
Et je sais que t'aime pas avoir les pieds mouillés à cause de moi
Mais ne t'en fais pas, je prends ma vague avec moi
Le temps de la laisser m'oublier, je pars loin de toi
Où y'a plus rien à voir que du bleu à s'en blaser
Où j'y jetterai l'ancre, avec elle ma tête bien accrochée
Mon cœur est une barque qui prend l'eau quelques fois
Et je sais que t'aime pas avoir les pieds mouillés à cause de moi
Et même si je nage comme une roche ne t'inquiète pas
J'ai déjà bu la tasse avec mon cœur sous le bras
J'irai quand même là où y'a plus que d'l'horizon
Où y'a d'quoi chavirer et s'faire pêcher par les poissons
Et peut-être bien que je reviendrai avec une rame en moins
Mais y'aura toujours bien ma vague qui aura levé les voiles
Hôtel des lilas
Les portes battantes volent derrière moi
Soudainement le temps s’arrête et devant moi
assis au comptoir le crime parfait
Ma chère je t’annonce qu’aujourd’hui
ta tête est mise à prix et que les lignes droites
ont bu leur dernier verre sans toi
Petite criminelle, où est passé ton cœur
Plus personne ne le voit, que reste-t-il de toi
Inutile de demander pardon
L’orgueil de l’homme est bien plus fort que toi
Gentiment dépose ton joli cou sous le couperet
Et d’un seul geste ils se vengeront de toi
Te coupant le cœur et tous tes lilas
La scène
J’ai mal de tous ses yeux qui regardent par les trous de la clôture de ma cour
C’est si facile pour eux de trouver des mots pour s’expliquer la vie des autres
Je garde les pierres dans ma poche et tente de fermer les yeux
Sur les bruits qui courent derrière mon dos et qui s’agrippent à la peau de mon égo
Ceux qui avaient des miroirs se sont gardés de juger la scène et d’alimenter le feu
Les autres ont bientôt fait de s’emparer d’un seul côté de notre médaille
D’y percer des trous pour se la mettre dans le cou
Une tache impossible à laver car la guerre sur la parole a bien su l’emporter
Les mains liées chacun de notre côté, on regarde le château carte tomber
Éventrée par les couteaux qui volent bas, un peu un peu trop bas
Rien de mieux à faire que de me dévorer à pleine bouche à pleine dent
Une entaille qui se creuse au passage de beaucoup trop de gens
Qui laissent derrière eux que la rudesse d’un orage
Et maintenant je dois marcher devant sans trop regarder par les trous de ma clôture
Et maintenant je dois marcher devant et poser nue sur une scène
Une scène ornée de grands rideaux que je refermerai gentiment
Afin de mettre fin
Afin de mettre une fin
Afin d’écrire moi-même la fin.
Voie ferrée
Je sens que le train au loin approche
Sous mes bottes le fer vibre comme le fait mon ventre lorsque je suis ta cible
La fumée noire me rappelle
Celle de ton cigare qui dansait vers le ciel étoilé du plafond de ma chambre
Je veux partir, mais je ne veux pas laisser tomber mes souvenirs qui n’entrent pas dans ma petite valise
Mais voilà que j’entend le sifflet du chauffeur qui crie de quitter les planches de la gare où j’ai si longtemps regardé la beauté du train passer
S’il-te-plait ne ligote pas ton joli corps aux chemin de fer pour qu’à jamais ta mort me hante
Pourquoi ne fais-tu pas sauter le pont ou plutôt dérailler la machine, je trouverais la mort en pensant a toi.
Je veux partir, mais je ne veux pas laisser tomber mes souvenirs qui n’entrent pas dans ma petite valise
Mais voilà que j’entend le sifflet du chauffeur qui crie de quitter les planches de la gare où j’ai si longtemps regardé la beauté du train passer
J’ai pris le train mais à chaque fois que j’ai regardé derrière moi j’ai vu les traces de tes pas qui ont marché à mes côtés sur les planches de toutes les gares et qui ont marqué le fil ma voie ferrée.
Western-chinois
Je n’aime pas
Quand le rouge de mes lèvres
Craque et s’en va
Au gré de mes tracas
J’ai le corps loin à l’ouest
La tête et le cœur en suspend
Pourquoi soudainement
Entre nous deux c’est du chinois
J’ai besoin d’être en manque de toi
J’ai besoin de notre éternel océan
J’ai besoin d’un corps en accord avec moi
Ma tête et mon cœur bien ancrés dedans
Je n’aime pas
Quand je me désaccorde
Que je dois recoudre entre elles
Toutes mes parcelles
Ramène-moi…
Ramène-moi…
Plaster
Je suis un volcan
J’ai craché mon sang sur ton village
Mon cœur en casse-tête
Le tien à la guerre
J’explose et te brûle
Je me saoule et me brûle
Aucun baume, aucun médicament
N’endorment les volcans
Mes amours en volcans
Se meurent souvent ou échauffent
Ton cœur si prudent qui sait aimer normalement
Un amour parsemé de trou et de plaster
Si apaisant pourtant
Mais mon cœur est une éternelle écorchure
Excuse-moi de m’être endormie sans penser à toi
Excuse-moi d’avoir fait comme les volcans
J’aimerais tant faire cesser les saignements
J’aimerais tant endormir les plaies de tes volcans
Je crois pas que t’étais mon plaster
Je crois pas que j’étais ton plaster
Peut-être que t’étais devenu mon doux plaster
Peut-être que j’étais devenu ton doux plaster
Un jour j’suis partie avec la boîte de plaster
Les oubliettes
Non je n’ai pas passé le balai sur notre histoire
Non je n’ai pas laissé la poussière se déposer sur nos mémoires
Des tonnes de belles diapositives projetées dans ma mémoire
Nos plus beaux souvenirs enfermés sous clé dans un tiroir
La rupture habite les maux de mon corps
Non je ne suis pas moins bien qu’avant
Les fusils qui visent toutes mes faiblesses
Je les ai moi-même érigés contre moi
Sans cesse je dois me répéter que non, je ne vaux pas moins qu’avant
Non je n’veux pas passer le pinceau sur les fissures
Non elles sont là pour me rappeler mes plus grands tremblements
Non je ne sais pas si un jour tes images de moi
Pourront reprendre le chemin de tes belles histoires